N°7 - 3ème trimestre 1998.
Qu'est-ce que l'accent ? C'est la couleur de la voix. Si le parler était un plat, l'accent en serait l'assaisonnement, s'il était une fleur, l'accent en serait le parfum.
On peut reconnaître l'origine d'une personne à son accent: on identifie facilement une parisien, un marseillais, un toulousain. Mais on ne peut reconnaître un ardéchois à son accent. Car notre petite patrie est en elle même un microcosme. On y trouve de multiples accents qui tous sont spécifiques et par conséquent identifiables. Mais il faut être du cru et savoir les déguster.
Il en est de doux et chantants, qui fleurent bon la garrigue et l'olive: l'albenassien, léger et discret, le vanséen, plus haut en couleur et parfumé, le largentiérois, bien arrondi et sans vulgarité, le vallonais, plus sec et dur et le bourguisan, tout rempli de l' élégance rhodanienne.
Il en est de rudes et fiers dont les intonations rappellent le grandiose des paysages où roulent les échos qui l'ont modelé: celui de Burzet, rempli de a noblesse de son granit, celui des Boutières où résonne la phonolite de ses lauzes, celui de Saint Agrève à la fois amer et doux comme la résine de ses sapins.
Il en est de discrets et tendres qui semblent tenter de se faire oublier: le tournonnais aussi solide et élégant que son Saint Joseph, le serriérois, qui, sans renier ses origines occitanes, s'est éloigné du soleil du midi.
Et puis il en est d'inattendus et drôles: l'annonéen, aux diphtongues ondulantes ("j'ai oublyé mes péantoufles à Kéance" "Séans blague ?"), celui de Préaux ( qui disparaît, quel dommage !) dont les R prennent des sonorités de G ( "je suis gendagme et je suis de Pgaux, pas vgai?").
"Tous ceux là, et bien d'autres" dirait Prévert, font partie des multiples accents
que l'on peut entendre en Vivarais. Mais malgré leur diversité, nous nous comprenons très bien, n'est-ce-pas ?
Michel GUIGAL